Nous avons appris à travers un communiqué du Ministère roumain de la culture que le 20 octobre 2021 s’est tenue au Musée national Peles de la ville de Sinaia, en Roumanie, une rencontre sous la coordination de l’historienne Mihaela Toader que nous interviewons pour nous donner plus de détails.
Bonjour Mihaela, je voudrais tout d’abord vous demander de vous présenter brièvement afin que les lecteurs français du blog Lettres Capitales puissent faire votre connaissance.
Je suis historienne et titulaire d’un doctorat en sciences politiques de l’Université de Bucarest. Depuis plusieurs années, j’organise des événements visant principalement à promouvoir le passé de la Roumanie d’un point de vue culturel et historique, à la fois à l’intérieur de la Roumanie et à l’étranger. J’ai initié et coordonné trois éditions de l’École d’été de Sinaia à l’Institut d’investigation des crimes du communisme et de la mémoire de l’exil roumain, qui avaient comme sujet central l’évocation de la personnalité du Roi Michel.
Comment avez-vous été amenée à coordonner la réunion du 20 septembre ? Pouvez-vous nous dire quelques mots sur l’Association pour la diplomatie européenne et l’identité culturelle (ADICE) ?
Cette année, j’ai pris l’initiative d’un projet culturel dans le cadre du centenaire du Roi Michel, et cela pour deux raisons : premièrement parce que j’avais eu l’occasion de le rencontrer à plusieurs reprises au palais Elisabeta dans un cadre officiel, mais aussi pour parce que mon grand-père paternel Anton Toader m’a transmis depuis ma jeunesse la mémoire de Sa Majesté. Ce projet que je coordonne est financé par le Ministère de la culture et réalisé par l’Association pour la diplomatie européenne et l’identité culturelle (ADICE) en partenariat avec le Musée national de Peles. L’association est une organisation non gouvernementale qui vise à promouvoir l’identité culturelle roumaine à l’intérieur du pays et à l’étranger.
L’année 2021 est une année spéciale liée au Roi Michel de Roumanie. De quoi s’agit-il ?
Oui, c’est l’année du centenaire de la naissance du Roi Michel de Roumanie. À cette occasion, plusieurs événements ont été organisés dans le pays autour de sa personnalité.
Que représente la figure du Roi Michel dans la conscience des Roumains d’aujourd’hui ?
Dans le cadre de mes recherches, j’ai eu l’occasion d’interviewer de nombreux Roumains qui avaient choisi la voie de l’exil avant 1989, l’année de la chute du régime communiste, et la plupart d’entre eux ont évoqué le Roi Michel comme une source de confiance, d’unité, de foi dans les valeurs de liberté et de démocratie et dans le fait qu’un jour la Roumanie serait libérée du communisme. À ce titre, je pense que le Roi Michel était un modèle et une référence morale pour les Roumains. Un exemple humain à suivre, à travers la bonté et la foi, la volonté et l’espoir, car avant d’être Roi, Mihai Ier de Roumanie était un grand homme.
Plus de 30 ans après la chute du régime, pensez-vous que l’histoire de la Roumanie a pu être réécrite et sauvée des déformations du régime communiste ? Entre l’abdication forcée de 1947 et le retour du Roi en Roumanie, 43 années se sont écoulées pendant lesquelles la propagande communiste n’a cessé de falsifier l’image de Sa Majesté. Quelle est la situation aujourd’hui ?
Il y a des historiens, surtout des jeunes, qui recherchent la vérité concernant le destin et le passé de Sa Majesté le Roi Michel et l’un des objectifs du projet culturel que je coordonne, qui se poursuit jusqu’au 15 novembre, intitulé « Le Roi Michel – un destin au service de la Roumanie », est précisément de mettre en lumière et de comprendre la vérité historique le concernant. La royauté avait une signification particulière pour les Roumains en exil dispersés dans le monde entier après que le Kremlin ait pris le contrôle de Bucarest par la mise en place du gouvernement communiste de Petre Groza. Par respect pour ces Roumains exilés et pour leurs descendants, nous devons canaliser nos forces pour comprendre la polémique qui dure encore aujourd’hui et la fracture existante dans la société roumaine concernant la personnalité historique du Roi Michel. Quant à l’acte d’abdication de 1947, je peux déjà vous annoncer que l’année prochaine, en 2022, cela fera 75 ans depuis cet acte historique et, avec votre consentement, j’aimerais vous en parler lorsque nous organiserons d’autres événements.
Revenons à la réunion du 20 octobre. Qui a ouvert l’événement et qui a pris la parole ?
L’événement a eu lieu, comme nous l’avons déjà précisé, au Musée National Peleș, de Sinaia, le 20 octobre 2021, dans la Grande Salle de Concerts, à 12 heures. J’y ai participé en tant que modératrice.
Lors de l’ouverture de l’événement, plusieurs personnalités ont pris la parole : Narcis Dorin Ion, directeur général du Musée National Peles, Alexandru Muraru, représentant spécial du gouvernement roumain pour la promotion des politiques de mémoire, la lutte contre l’antisémitisme et la xénophobie, Dinu Zamfirescu, membre du Collège CNSAS (Conseil national pour l’étude des archives nationales), Camelia Csiki, TVR, émission « L’Heure du Roi », Tudor Vișan-Miu, Université de Bucarest, Adrian Niculescu, professeur d’université SNSPA (Ecole nationale d’études politiques et administratives).
Le documentaire culturel et historique réalisé par l’Association pour la Diplomatie Européenne et l’Identité Culturelle (ADICE) a mis en évidence le rôle déterminant du Roi Michel et de la Maison Royale dans l’histoire de la Roumanie, tant à travers les interviews filmées réalisées par des personnalités culturelles telles que Dinu Zamfirescu, membre du Collège CNSAS, Ștefania Dinu, directeur général adjoint du Musée National de Cotroceni, Simona Preda, historienne et essayiste, Adrian Niculescu, professeur SNSPA, Mihaela Toader, historienne, qu’à travers le débat au Musée National de Peles.
D’autres réunions seront organisées, notamment à l’occasion du centenaire de la naissance du Roi Michel ?
Je ne peux pas vous donner plus de précisions pour l’instant. Compte tenu des risques de pandémie, je pense qu’il y aura davantage d’événements en ligne. Personnellement, j’ai eu la chance d’organiser le débat au château de Peleș lorsque les conditions étaient encore plus ou moins favorables. J’en profite pour remercier Narcis Dorin Ion, le directeur du Musée national Peleș, pour son soutien dans l’organisation de l’événement.
On a beaucoup parlé du rôle du Roi en tant que référence morale et exemple pour les générations actuelles de Roumains. Vous faites partie de la jeune génération. Pourquoi pensez-vous que le Roi Michel peut être un exemple pour votre génération ?
Aujourd’hui, les jeunes sont désireux de tout ce qui a de la valeur en tant que repère d’éducation, d’espoir et de confiance, et je pense que certains d’entre eux ont choisi le Roi Michel comme modèle. Et, ne l’oublions pas, la mort du Roi Michel, au-delà des regrets de son départ pour l’éternité, a uni, plus que jamais, toute l’énergie de l’âme des Roumains. Cela a été, à mon avis, une sorte de renaissance de notre âme. Je crois que c’est l’un des moments où les Roumains ont montré leur chemin pour sortir de l’état de confusion et ont choisi le Roi Michel comme référence morale et modèle d’espoir et de guide.
Enfin, pouvez-vous nous dire avec quel sentiment vous avez quitté la réunion du 20 octobre ? Pourquoi cela a-t-il été un succès pour vous ?
J’ai éprouvé un sentiment de plénitude émotionnelle du fait que nous avons pu célébrer, avec nos invités, le 100e anniversaire de la naissance du Roi Michel, à Sinaia, le lieu où il est né et a grandi. De même, les discours des invités ont évoqué non seulement la réalité du passé du Roi Michel, un destin aux multiples facettes, mais aussi les sentiments et les émotions de sa rencontre, car toutes les personnes présentes ont connu Sa Majesté le Roi Michel de son vivant.
« Le monde de demain ne peut exister sans morale, sans foi et sans mémoire » (Le Roi Michel)
Propos recueillis et traduits du roumain par Dan Burcea
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