Julie Vasa – Le Festival du LÀC : « La réalisation d’un tel événement repose sur une envie et un enthousiasme partagés »

Le Festival du LÀC est un événement littéraire qui s’est tenu entre le 2 et le 3 octobre 2021 dans le Parc de la Ferme de Saint-Maurice à Collonge-Bellerive dans le Canton de Genève. Animé par une équipe passionnée et enthousiaste, il propose des rencontres avec des écrivains, des conférences, des présentations de livres.

Nous donnons ici la parole à Julie Vasa, journaliste et membre de l’équipe fondatrice de cette manifestation culturelle pour nous parler de cette édition 2021.

Bonjour Julie, comment ça va après ces deux journées de Festival ? On ne dira jamais assez le rôle fondamental que représente ce type de manifestations à la fois pour les auteurs et pour le public.

Épuisée mais heureuse, extrêmement ! Nous avons travaillé avec mes amies depuis plus de deux ans sur ce projet de Festival, reporté deux fois en raison de la crise sanitaire. Il a donc finalement eu lieu et fut très festif et chaleureux !

Pouvez-vous nous expliquer la signification du sigle LÀC ? Comment est née cette initiative et qui œuvre à vos côtés dans l’équipe fondatrice de ce festival ?

LÀC est l’acronyme de Livre À Collonge, nom de la commune toute proche de Genève où le Festival a eu lieu. Ces trois lettres se sont imposées immédiatement comme nom pour notre Festival qui se tenait sur un site avec vue sur le Léman ! Nous organisions depuis plusieurs années avec Sandrine Bourgeois des cercles de lecture : le Cercle des Lectrices Bienveillantes et le cercle de L’Apostrophée. Nous y invitons régulièrement des auteurs et ils sont en général si satisfaits des échanges proposés et de l’accueil réservé qu’ils reviennent nous rendre visite à chaque nouvelle publication ! Sandrine a eu l’idée de partager avec un plus grand nombre la possibilité d’assister à de telles rencontres littéraires. Elle a alors réuni autour d’elle quatre amies passionnées de littérature : Delphine Stouff, Valérie Billon, Agnès Schmidlin et moi. L’idée paraissait « folle », difficilement réalisable, mais nous nous sommes prises au jeu, portées par les soutiens et l’enthousiasme qui se sont rapidement manifestés à nos côtés.

Qui préside cette première édition ? Qui sont les autrices et auteurs invité(e)s ?

Nous avons eu un premier soutien très important, celui de Pierre Assouline. Il a manifesté son intérêt pour l’événement dès que nous lui en avons parlé et a accepté immédiatement d’en coprésider la première édition. Il nous a soutenues avec bienveillance et générosité, nous prodiguant souvent de judicieux conseils. Nous avons confié la co-présidence du Festival à une auteur de Suisse romande, Mélanie Chappuis. Talentueuse, écrivant tout à la fois des romans, des pièces de théâtre, des chroniques… son soutien nous a également été très précieux. Elle nous a notamment permis d’ancrer davantage encore le Festival dans le paysage littéraire suisse. Les auteurs invités ont été principalement ceux avec lesquels nous étions en relation, soit dans le cadre de nos cercles de lectures, soit grâce à nos activités littéraires autres comme la tenue de blogs littéraires, la publication d’articles sur des sites ou dans le Elle Suisse, etc. Les maisons d’édition nous ont aussi suggéré parfois certains auteurs. Au final, ils étaient quasiment 100 !

Signalons également la présence de plusieurs associations et fondations suisses. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Nous en avons sollicité quelques-unes pour l’organisation de conférences en lien avec le thème du Festival cette année : la Mémoire. Ainsi, le vice-président de la Fondation Martin Bodmer, Nicolas Ducimetière, est intervenu sur le thème « Mémoires de guerre, guerres de la mémoire » ; le Professeur Giovanni Frisoni du centre de la mémoire des Hôpitaux Universitaires de Genève a quant à lui évoqué la maladie d’Alzheimer ; Bernard Baertschi et Hervé Chneiweiss, membres du Comité scientifique de la Fondation Brocher, ont échangé sur le thème « Mémoire et littérature ». Nous avons également contacté des fondations pour nous soutenir. Ainsi, la Fondation Brocher nous a aidées en logeant une vingtaine d’auteurs dans un cadre exceptionnel ! Ont aussi été présentes à nos côtés dès cette première édition la Fondation Jan Michalski pour l’écriture et la littérature et la Fondation Payot principalement.

Quel a été le thème fédérateur de cette édition 2021 ?

Il s’agissait de la mémoire. Je l’ai évoqué pour les conférences organisées avec des fondations. Mais ce thème nous a également guidées pour inviter certains auteurs ayant écrit sur ce sujet et pour définir l’ensemble des tables rondes et des rencontres. La mémoire a été au cœur des animations, des tables rondes et des lectures musicales et a été abordée sous des angles différents : littéraire, scientifique, historique…

Quant au programme, pouvez-vous nous parler des rencontres et des tables rondes qui ont été organisées dans deux espaces – Le Petit Lac et le Grand Lac – tout au long de ces deux jours ?

Elles ont été nombreuses : 46 sur les deux journées ! L’idée était de donner la parole à un maximum d’auteurs et de proposer au public une grande diversité d’échanges avec, toujours comme point d’accroche, la mémoire. Impossible de les citer toutes ici, juste quelques une d’entre elles : Macha Méril : La mémoire de l’exil ;  Blandine de Caunes & Sarah Biasini : La transmission familiale, écrire pour passer le témoin ; Sylvie le Bihan & Xavier de Moulins : La mémoire familiale ; Laure Mi-Hyun Croset : L’élégance du souvenir ; Abigail Seran : Mémoire des anciens ; Sébastien Spitzer & Oscar Lalo : Des livres pour ne pas oublier ; Marion Emonot & Ananda Devi : Femmes dans l’adversité ; Gilles Paris & Gaëlle Josse : Quand le corps vacille…

Trois prix littéraires sont accordés en lien avec Le Festival du LÀC : Le Prix du LÀC ; le Prix des Bienveillantes et le Prix littéraire Gonet 2021. Pouvez-vous nous donner plus de détails concernant les critères de sélection, la composition des jurys et la remise de ces prix ?

Le Prix du LÀC vise à mettre à l’honneur en Suisse un auteur de talent et a pour originalité de couronner un écrivain dont le thème de l’ouvrage est en lien avec celui choisi pour le Festival chaque année. L’ouvrage lauréat doit paraître entre juin de l’année précédant la remise du prix et mai de l’année de remise. Une première sélection de neuf romans ou essais est réalisée par le comité organisateur du Prix du LÀC. Le jury, composé d’une soixantaine de lectrices et lecteurs issus de cercles de lectures genevois, de bibliothécaires, de blogueurs et d’amis, élit le lauréat parmi les ouvrages sélectionnés. Le Prix du LÀC 2021 a été attribué à Theresa Révay pour son livre « La Nuit du premier jour » (Albin Michel).

Le Prix des Bienveillantes récompense quant à lui un ouvrage « coup de cœur » du Comité Fondateur du Festival, choisi dans la première sélection du Prix du LÀC. Olivia Elkaïm est la lauréate 2021 pour son roman « Le tailleur de Relizane » (Stock).

Et enfin, le Prix Littéraire Gonet : partenaire du Festival du LÀC, la banque privée Gonet&Cie SA récompense un ouvrage francophone original, de tout genre littéraire et en lien avec les enjeux sociétaux de notre temps. Contribuant au rayonnement culturel du Festival du LÀC, ce prix est décerné dans un esprit indépendant, sensible à la fois au caractère divertissant de l’ouvrage primé et à son ouverture à une sensibilisation originale sur le monde moderne. Le jury du Prix Gonet, composé d’une trentaine de jurés pour la première édition, a couronné un lauréat parmi une sélection de 5 ouvrages : il s’agit de Marion Emonot pour son livre « Ressuscité » (Slatkine).

Parlez-nous également de vos sponsors. Qui sont-ils et que représente pour ce Festival leur soutien ? 

La réalisation d’un tel événement repose évidemment sur une envie et un enthousiasme partagés. Mais sans financement, rien de possible ! Nos partenaires et sponsors ont été nombreux et nous leur en sommes très reconnaissantes ! Nous avons d’abord été soutenues par la Commune de Collonge-Bellerive qui a accueilli le Festival. Le site de la Ferme de Saint-Maurice, avec ses vues sur le Jura, les vignes et le lac est absolument fabuleux et a sans nul doute grandement contribué au succès de l’événement. Nous avons ensuite sollicité la librairie Payot qui nous a immédiatement suivies, tant par le biais de sa fondation que par la logistique mise à notre disposition et mille autres précieux conseils sans lesquels le festival n’aurait pu se tenir. L’Hôtel Métropole a aussi été l’un de nos soutiens de la première heure et nous a permis, notamment, de proposer aux auteurs de passer un merveilleux moment sur la terrasse de l’hôtel avec vue sur le Jet d’eau. L’entreprise Arko visuel, avec Agathe Myard, notre graphiste et architecte d’intérieur, nous ont aussi accompagnées dès le début de l’aventure, adaptant la magnifique affiche réalisée par Zep à tous les moyens de communication que nous avons utilisés : affiches, flyers, programmes… La Banque Gonet & Cie SA enfin, nous a aussi rejointes et nous sommes très heureuses d’avoir pu créer avec elle un nouveau prix littéraire ! À côté de ces principaux sponsors et partenaires, de nombreux autres nous ont accompagnées. Je pense en particulier à plusieurs communes proches de Collonge-Bellerive, à des artisans et commerçants locaux et parmi eux, Caran d’Ache qui a offert de jolis stylos à tous les auteurs présents…

Quel bilan dressez-vous à quelques jours de cette première édition ? Des espoirs pour continuer ?

Le bilan est extrêmement positif ! Organiser un premier événement, surtout en étant totalement novices en matière d’événementiel, relevait d’un véritable challenge ! Le public a été au rendez-vous, les auteurs aussi, au-delà de ce que nous pouvions imaginer ! Ce type d’événement n’existait pas encore sur la Rive gauche du Léman et nous avons eu le sentiment de répondre à une attente. Tous les espoirs sont donc possibles pour la suite ! Au-delà de l’événement en lui-même, j’ai adoré l’aventure humaine qu’a constitué l’organisation de ce Festival. Notre équipe de cinq femmes – « Les Dames du LÀC » comme certains nous désignent désormais ! – était essentiellement liée au départ par le même goût pour la littérature. Après deux ans de travail ensemble, nous partageons désormais bien davantage et j’ai trouvé cette aventure extraordinaire ! J’ai également été très touchée par la confiance que les auteurs notamment nous ont témoigné. La moitié d’entre eux venait de Suisse, les autres de France et même de Belgique ! Nous les avons invités et ils ont spontanément répondu oui. Cet engagement pour un festival qui débutait m’a émue et j’avoue rétrospectivement l’appréhension que je ressentais à les faire venir si l’événement n’avait pas été réussi… Même crainte évidemment vis-à-vis de tous ceux qui se sont engagés avec nous. Je suis donc aujourd’hui rassurée !

Dans le nombre je suppose richissime de moments passés pendant ce festival il y en a qui vont rester dans votre mémoire. Pouvez-vous nous en donner quelques exemples ?

Compliqué effectivement d’en sélectionner seulement quelques-uns. Je pense notamment au quatuor le Moser String Quartet qui nous a offert deux moments très émouvants : ces jeunes musiciennes si talentueuses ont interprété la musique de La liste de Schindler à la suite de l’intervention de Pierre Assouline sur « Le dernier des Camondo », la nouvelle version de son livre illustrée ; elles ont aussi conclu en beauté les propos d’Evelyne Bloch-Dano à propos de sa biographie consacrée à Nathalie Bauer-Lechner, « L’âme sœur » de Gustave Mahler, illustrée par le sublime Adagietto de la 5e symphonie de Mahler. La musique était encore au rendez-vous avec Sophie De Baere et Pierre-Hugues qui ont interprété une lecture musicale du roman de Sophie, « Les corps conjugaux », devenus « Les corps musicaux », une parenthèse enchantée ! Les remises de prix à nos lauréates ont également été marquantes et leur enthousiasme communicatif. Le Grand Prix des Blogueurs Littéraires créé par Agathe Ruga a aussi été remis pendant le Festival à Caroline Laurent pour son livre « Rivage de la colère », un moment joyeux ! Autre temps fort du Festival : la célébration du centenaire de la naissance de San-Antonio en présence de ses enfants, Frédéric Dard ayant passé une grande partie de sa vie en Suisse : un hommage brillant et touchant par Eric Bouhier, auteur du « Dictionnaire amoureux de San-Antonio ». Les échanges entre les auteurs ont été passionnants et un m’a personnellement marqué : Metin Arditi et Pierre Assouline ont discuté des différences entre biographe et romancier : ils n’étaient pas d’accord et c’était merveilleux !

Propos recueillis par Dan Burcea

Photo de Julie Vasa -© Karin Bauzin

Photo du Comité dorganisation du Festival – © Anne-Noëlle

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