Portrait en Lettres Capitales : Galien Sarde

 

 

Qui êtes-vous, où êtes-vous né, où habitez-vous ?

Je suis né à Blois, près de la Loire. Je vis actuellement à Cognac, près de la Charente et des vignes.

Vivez-vous du métier d’écrivain ou, sinon, quel métier exercez-vous ?

Pour lors, je ne vis pas de ce que j’écris mais des cours que je donne au lycée de Cognac, en tant que professeur de lettres modernes. Autant que possible, je ne mélange pas ces activités différentes, cependant des passerelles se font d’elles-mêmes entre les deux, porteuses de sens.

Comment est née votre passion pour la littérature et surtout pour l’écriture ?

Ma passion pour la littérature est née de la lecture, à seize ans, des Fleurs du Mal, de Baudelaire, et des Chants de Maldoror, de Lautréamont. Spontanément, l’envie d’écrire a découlé de ces découvertes majeures, fascinantes. Un nouveau monde s’ouvrait à moi.

Quel est l’auteur/le livre qui vous ont marqué le plus dans la vie ?

Les Fleurs du Mal, originelles, comme je viens de le dire. Et À la Recherche du Temps perdu, lue une première fois vers vingt ans, puis lue et relue depuis, dans un émerveillement intact. Perfection de l’écriture, dans les deux cas, qui éclaire des vérités humaines dans une hauteur de vue émouvante.

Quel genre littéraire pratiquez-vous (roman, poésie, essai) ? Passez-vous facilement d’un genre littéraire à un autre ?

Je suis avant tout romancier. La poésie, pratiquée plus jeune, et rejointe dernièrement, a été un tremplin merveilleux, au bout duquel se sont imposés la prose, le récit, le temps long de ce dernier. Ma soif d’idéal devait transiger avec le réel, et c’est ainsi, naturellement, que le roman m’est venu, comme j’avais vingt-six ans. Un texte autobiographique d’une centaine de pages a d’ailleurs servi de déclencheur au premier que j’ai conçu, texte dont une part du contenu gagna en fait à être filtrée par la fiction. Récemment, j’ai même écrit plusieurs nouvelles, alors que ce genre était loin de mes préoccupations esthétiques, a priori. Par là-même, on le voit, les frontières génériques sont poreuses – au moins pour moi. Néanmoins, chaque genre est distinct et convoque des techniques d’écriture qui lui sont propres.

Comment écrivez-vous – d’un trait, avec des reprises, à la première personne, à la troisième ?

Pour mes romans, j’écris par strates. Un premier flux donne la matière première, esthétique et émotionnelle, laquelle est ensuite reprise pour qu’aboutisse l’élan initial. Une attention particulière est accordée, alors, aux personnages, aux logiques qu’ils impulsent au récit, ainsi qu’à leur monde, qu’ils colorent. Pour finir, un regard formel, dont le pointillisme n’oublie pas les courants de fond du roman, parachève le texte, une série d’arbitrages aussi pointus que possible. L’ensemble peut prendre des années. Pour ce qui est de la personne à laquelle le récit se fait, tout est ouvert.

D’où puisez-vous les sujets de vos livres, et combien de temps est nécessaire pour qu’il prenne vie comme œuvre de fiction ?

En partie, le sujet de mes livres vient de ce que je vis ou de ce que j’ai vécu. Des personnes que j’ai rencontrées. L’existence appelle des mots, des situations, des idées, qui convergent en profondeur dans les courants d’une fiction qui se fait d’elle-même. D’autres œuvres, livresques ou filmiques, abreuvent aussi ce que j’écris.

Choisissez-vous d’abord le titre de l’ouvrage avant le développement narratif ? Quel rôle joue pour vous le titre de votre œuvre ?

Cela dépend. Il arrive que le titre tombe très vite, quitte à être changé en fin de compte. Il arrive aussi qu’il ne s’offre qu’en bout de course, couronnant le contenu du livre auquel il sert d’emblème. Il est en tous cas essentiel : il doit atteindre au cœur du texte, mais avec une certaine distance, une part de jeu littéraire.

Quel rapport entretenez-vous avec vos personnages et comment les inventez-vous ?

Mes personnages résultent le plus souvent de personnes réelles – de « pilotis », dirait Stendhal. Plus ou moins, la fiction les réfracte. Ils peuvent encore venir de moi, des possibles que je recèle – auquel cas, on rejoint le concept d’ « ego expérimentaux », dont parle Kundera. Quoi qu’il en soit, à travers eux j’interroge des virtualités existentielles en temps de crise.

Parlez-nous de votre dernier ouvrage et de vos projets.

Publié par les éditions Fables fertiles, mon dernier livre s’intitule Échec, et Mat. Né d’un rêve, il raconte une double traversée du désert, intérieure, extérieure. Il touche à la fois au roman d’anticipation et au roman d’aventures – pour ne pas dire à l’odyssée. Son style lyrique et syncopé prend sa source dans le désir de son narrateur-héros, nommé Théo. À travers ce que vit ce dernier, le roman sonde la notion de fiction, jusqu’à la limite. Je compte poursuivre ce questionnement sous d’autres angles dans mes prochains récits, dont le style émanera, lui aussi, des désirs les plus hauts des personnages centraux.

 

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