Sarah Oling : « J’ai fait voler en éclats les mots, tous les mots qui parlent de silence, d’enfermement, de contrainte et d’aliénation »

 

De « qui »    le confinement est-il le nom ?

Alors que, depuis quelques semaines, j’entends prononcer « confinement » dans toutes les langues, je n’en avais pas mesuré pleinement le sens et la résonance.

Confinement… Cela, ce nom, là, me conduit en des terres lointaines que je n’ai jamais vraiment voulu aborder… Nom en résonance d’un silence ancien, qui ne sera plus en mesure de se briser…   Dans cet instant de cette présence à ce qu’évoque la musique de ce mot, prononcé à travers le monde comme un tango angoissant, je retrouve ce sentiment d’étouffement provoqué par ce silence…

Confinement. C’est une musique d’exil, c’est une musique d’abandon… D’abandon, par celui que je ne nomme pas dans l’instant, de toute forme d’espérance en un lendemain heureux. L’espérance met en danger lorsqu’elle est par essence frappée d’impossibilité…Lorsque ce confinement-là, en ce temps-là, c’était dans les vastes plaines de Haute de Silésie qu’il eut lieu Un confinement intérieur de trois ans…. Trois ans.

Est-ce l’auteure que ce confinement questionne ? Est-ce la fille de ce « qui » ?

Depuis, en son nom, peut-être, grâce à lui, peut-être, j’ai fait voler en éclats les mots, tous les mots qui parlent de silence, d’enfermement, de contrainte et d’aliénation.

Pour composer d’autres partitions, porteuses de vie, d’espérance, de lendemains non empêchés. Par une forme d’angélisme lucide. Et parce que, ce que mon père n’a pu me transmettre, je l’ai cependant « entendu »…

Sarah Oling

en ce 31 mars 2020

Fille de déporté rescapé de la Shoah, elle a transcendé son expérience personnelle en un engagement indéfectible autour d’une pédagogie active et innovante de la Mémoire (conférences interactives, dialogues libres avec des étudiants, lycéens et collégiens).

Auteure, elle dit de l’écriture qu’elle lui est aussi indispensable que l’air qu’elle respire.  « Pour un peuple d’oiseaux » , une fiction au cœur du projet « Consciences en convergences »,  est son cinquième ouvrage,  réédité  aux Editions Absolues en mars 2020.

Journaliste radio et presse écrite , elle a récemment  co-réalisé et co-animé une série d’émissions  « Cultures Vivantes » sur la  web radio Bubble Art.

Pendant quelques années, elle a été chargée de mission au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation de Lyon, pour recueillir le témoignage de déportés, de résistants et d’anciens enfants cachés. Par son intermédiaire, les mots, ceux des autres, devenaient ainsi passage et passerelle mémorielle vers le grand public.

 Un temps comédienne de théâtre, elle dit avoir eu l’immense privilège d’être sur scène avec Isabelle Sadoyan  dans Savanah Bay de Marguerite Duras, qui, par la puissance de son travail, lui insuffla un immense amour de la scène et un respect infini pour le théâtre. 

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