Portrait en Lettres Capitales : Mona Azzam

 

Qui êtes-vous, où êtes-vous née, où habitez-vous ?

Je suis née en Côte d’Ivoire où j’ai passé toute mon enfance. Actuellement, je vis à Carnon Plage, à proximité de Montpellier.

Qui suis-je ? Une citoyenne du monde, de partout et d’ailleurs, les mots étant ma véritable patrie.

Vivez-vous du métier d’écrivaine ou, sinon, quel métier exercez-vous ?

Je ne vis pas encore de mon métier de scribe. Je suis professeur de lettres modernes.

Comment est née votre passion pour la littérature et surtout pour l’écriture ?

D’aussi loin que je m’en souvienne, j’ai toujours lu. À une époque lointaine et heureuse où la télé, Internet étaient absents, ma mère avait instauré le rituel de la lecture tous les soirs. Je dévorais les livres. Je m’évadais. Ce qui n’a guère changé puisqu’en plus d’être une grande lectrice, de par mon métier, j’essaye de transmettre ma passion à mes élèves.

Quant à l’écriture, mes premiers gribouillis remontent à mes 10 ans. Avec un roman que j’ai retrouvé il y a quelques temps. Une expérience inédite, que de se relire 40 ans plus tard !

Quel est l’auteur/le livre qui vous ont marqué le plus dans la vie ?

Albert Camus aura marqué toute ma vie et l’ensemble de ma pensée. Je lui dois beaucoup, en ce sens qu’il a fait de moi celle que je suis. Il n’a pas fini de me marquer. Pas un jour ne passe sans que, face aux fluctuations du monde, je ne me pose la question : qu’aurait dit Camus ? Qu’aurait fait Albert Camus ?

Noces de Camus reste Le Livre par excellence. Mon Livre.

Quel genre littéraire pratiquez-vous (roman, poésie, essai) ? Passez-vous facilement d’un genre littéraire à un autre ?

Pour moi, il n’y a pas d’exclusivité au niveau des genres littéraires. Dès le moment où l’on s’aventure à écrire, on se doit de se frotter à tous les genres. La palette de la création littéraire est d’une richesse inépuisable.  J’écris aussi bien des romans, des nouvelles, de la poésie et des essais et je n’ai aucune difficulté à passer d’un genre à l’autre.

Mais le plus important, pour un auteur, au-delà de la notion de genre littéraire, c’est de savoir se renouveler tant au niveau des thématiques que du style. Le plus grand défi d’un auteur, c’est de surprendre ses lecteurs. Et de les bousculer.

Comment écrivez-vous – d’un trait, avec des reprises, à la première personne, à la troisième ?

Dans un premier temps, j’écris d’un trait car le tout est déjà dans ma tête depuis un long moment. Et quand je commence, je ne m’arrête plus. Quel que soit le lieu ou le moment. Au grand dam de mes proches qui me voient m’en aller vers un ailleurs où nul ne peut m’atteindre. Une fois abouti, mon texte « repose » telle une pâte qu’il est nécessaire de laisser monter. Je m’en détache totalement avant d’y revenir plus tard. Temps de la relecture à voix haute, du polissage et de l’affinage.

Personnellement, je n’ai pas de préférence pour la première ou la troisième personne. C’est la typologie de l’écrit qui guide mon choix.

D’où puisez-vous les sujets de vos livres, et combien de temps est nécessaire pour qu’il prenne vie comme œuvre de fiction ?

Je puise les sujets de mes livres dans l’univers qui m’entoure. Il suffit parfois d’un fait divers, d’une rencontre, d’un paysage pour que naisse l’idée. J’ai aussi pour habitude (bonne ou mauvaise, je ne sais) d’observer les gens et dans ma tête, de leur inventer des vies.

Quant au temps nécessaire à la naissance d’une œuvre, je dirai qu’il n’y a guère de temps quantifiable. L’écriture se fait comme une gestation au-delà du temps des horloges. Elle a son temps qui lui est propre. Certains écrits nécessitent des années de recherche, de réflexion quand d’autres sont déjà là, à peine conçus.

Choisissez-vous d’abord le titre de l’ouvrage avant le développement narratif ? Quel rôle joue pour vous le titre de votre œuvre ?

Il est des titres qui s’imposent d’eux-mêmes. C’est le cas de Ulysse a dit… paru aux Editions  La Trace. Comment ? Pourquoi ? Je ne sais. Les mystères de la création.

D’autres viennent après coup. Parce que, en écriture,  si l’on sait d’où l’on part, l’on ignore où on arrive.

Le titre, selon moi, joue un rôle primordial : il est la clé qui ouvre les portes permettant d’accéder à cet Ailleurs qu’est un écrit.

Quel rapport entretenez-vous avec vos personnages et comment les inventez-vous ?

Mes personnages m’habitent. Physiquement et moralement. Ils vivent avec moi et en moi. Je les vois et j’ai besoin de les voir.  Parfois ils me secouent ; me font souffrir. Parfois ils me réjouissent. Ce sont eux qui me guident. Et leur voix résonne en moi de manière troublante.

Les ai-je inventés ? Je l’ignore. Sans doute étaient-ils là. Quelque part en moi. Attendant mes mots pour être.

Parlez-nous de votre dernier ouvrage et de vos projets.

Ulysse a dit… paru aux Editions La Trace est un roman qui me tient particulièrement à cœur, en ce sens qu’il porte les valeurs humanistes auxquelles je suis profondément attachée : celle des migrants. Il est aussi une expérience d’écriture inédite, la deuxième partie du roman ayant été écrite après avoir été longtemps « gueulée »  à la manière de Flaubert.

Quant à mes projets, mille vies ne suffiraient pas tant ils sont nombreux. Diverses surprises attendent mes lecteurs à l’horizon. J’espère qu’ils seront au rendez-vous.

Mais, étant plus « fourmi » que « cigale », je m’abstiendrai de dévoiler dans l’immédiat en quoi consistent ces projets. La surprise n’en sera que meilleure.

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