Les inséparables sont des Salières – Poivrières que j’ai dessinés et qui sont édités depuis 1996.
Ces petits objets sont nés d’une sculpture que j’avais réalisée quelques mois auparavant pour le mariage d’un ami.
L’idée, symbolique, était que ces deux personnages, unis par les liens du mariage ne tiennent debout que dans les bras l’un de l’autre. Dans la sculpture, j’avais trouvé ce point d’équilibre où, séparés, ils tombaient.
Depuis, ces petits objets ont vécu leur vie, ont été copiés à de nombreuses reprises partout sur cette planète, et continuent de vivre sur de nombreuses tables dans de nombreuses maisons habitées par ceux qui les regardent, et peut être inversement…
Si j’aime cet objet, c’est avant tout pour sa portée symbolique et poétique. On ne peut pas les séparer, car leurs formes qui tendent l’une vers l’autre incitent toujours à les réunir. Posés sur une table, le réflexe naturel est de les assembler. L’union, la communion, le rapprochement, finalement le lien qui nous unit, voilà ce qui me touche en regardant ces petits objets fonctionnels.
A cette question que nous nous posons toujours, « Objets inanimés, avez vous donc une âme »…je réponds oui.
J’ai toujours eu ce sentiment, que l’âme des objets existe et tient pour l’essentiel à ce qu’ils me chuchotent à l’oreille… la forme bien sûr est importante, mais elle résulte d’une intention. En y ajoutant ce petit supplément d’âme, nous prenons instantanément de l’altitude et nous éloignons de notre rapport à la terre pour nous élever vers cet autre lieu que chacun définira….
Rien ne doit être gratuit, on peut faire du beau, du fonctionnel, mais ce n’est pas suffisant, il faut aussi pouvoir émouvoir, faire réfléchir, créer de l’étonnement, ou simplement faire sourire.
C’est ce sourire qui se dessine sur les visages lorsqu’ils regardent mes Inséparables qui est ma récompense, celle d’avoir su créer un petit objet qui touche le cœur au delà de l’esprit.
C’est toute la vie qui est là, la vie telle qu’elle me touche.
Savoir regarder, aimer, tendre vers l’autre. Cet autre est bien sûr sous sa forme amoureuse, mais pas seulement, cet autre, c’est le lien qui nous unit tous sous n’importe quelle forme.
Ces petits objets racontent à leur manière l’histoire de mon humanité, celle qui est bouleversée quand l’autre se détourne, celle qui est blessée quand l’autre ne comprend pas, celle qui est désemparée quand l’autre s’éloigne.
Il n’y a de sens que dans l’échange, dans cette tension parfois imperceptible qui nous permet de tisser du lien.
Cet objet fuit la solitude, celle qui existe en chacun de nous.
Emmanuel de Landtsheer, 17 février 2021