Hélène Dassavray : « Que sera devenue la nécessité d’écrire, le jour d’après ? »

 

Les deux tiers de l’humanité.
Ce chiffre tourne en boucle dans ma tête.
Comment penser à autre chose ?

Les deux tiers de l’humanité entrés, sidérés, dans ce même insensé.
Chacun dans son antre.
Entre parenthèses, entre ses murs, entre soi.
Parfois à nos balcons, en reconnaissance, entre le je et le nous.

Entre la peur, de l’ennemi invisible, des souffrances, de la mort, des égoïsmes fous,
et l’ivresse de ce silence, de la clarté de l’air, des solidarités.
Impossible de parler, d’écrire, autre chose.

On ne voit pas grand-chose d’ici, entre collines et coquelicots, mais, hébétés, on retient son souffle, comme les autres.
Comment penser à autre chose qu’à la première ligne ?

Ce n’est pas la première fois que la réalité dépasse tous les imaginaires mais c’est la première fois que la planète entière la vit en instantané.
On a tout essayé, frères de tous les pays, au final c’est un virus qui nous relie.
Le sentiment de vivre une parabole, chercher ce qui se dit.
Entre les lignes.

S’employer à déployer tout ce qui peut aider à la légèreté.
Comme s’interroger sur la littérature.
Entre futile et salvatrice.
Elle et nous changeons avec cette réalité.
Depuis ce point de suspension.

A quel moment sera-t-il possible d’écrire autre chose ?
Que sera devenue la nécessité d’écrire, le jour d’après ?
Entre quelles mains sera la littérature de demain ?
Que sera-t-elle devenue entre-temps ?

Ce ne sont jamais que quelques-unes de plus dans l’immensité de questions que chacun peut voir de sa fenêtre.
Entre notre passé et l’inédit…

Hélène Dassavray nait au milieu du siècle dernier dans le plus petit département de France. Le bac en poche elle part dans le sud étudier la vie, le rock’n roll, et l’amour. Après les nombreux et divers métiers d’usage (un peu orientés tout de même : bibliothécaire, libraire, animatrice d’ateliers d’écriture…) puis la création d’un café culturel associatif, elle partage aujourd’hui son temps entre le Sud et Paris où elle organise des manifestations culturelles, des ateliers d’écriture, et milite pour la légalisation de la douceur. Elle écrit depuis qu’elle sait le faire, mais en 2000 elle se rend compte que sa prose peut intéresser des lecteurs. C’est ainsi qu’elle écrira son premier roman “Les ruines de la future maison”, publié en 2008, un succès du bouche à oreille en cours de réédition. D’autres ouvrages suivront, romans ou recueils de poésie. Si le matériau de base d’Hélène Dassavray est l’autofiction, elle en fait ressortir avec une tendre dérision les émotions universelles dans un maniement subtil de la langue. Ses écrits sans fioritures sont à cheval entre le simple et le sublime ; ils racontent sans dire, nous dévoilent une humanité avec ses travers, parfois blessée à vif, mais toujours belle et espérante. Des phrases ciselées en arabesques tendres, l’humour en filigrane, la dérision en toile de fond. Un critique a trouvé la formule lorsqu’il l’a qualifiée de “poète du réel”. On pourrait ajouter : dentelière de mots et conteuse de l’âme. (Flore Naudin)

Site d’Hélène Dassavray : https://helenedassavray.fr/

 

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