Portrait en Lettres Capitales : Nicolas d’Estienne d’Orves

 

 

Qui êtes-vous, où êtes-vous née, où habitez-vous ?

Je m’appelle Nicolas d’Estienne d’Orves, je suis né à Neuilly-sur-Seine le 10 septembre 1974 et j’habite à Paris.

Vivez-vous du métier d’écrivain(e) ou, sinon, quel métier exercez-vous ?

Je vis, bon an mal an, de mon métier d’écrivain, après avoir eu longtemps pour filet de sécurité une collaboration régulière au Figaro. Mais je collabore toujours çà et là à la presse culturelle (je suis critique d’opéra pour Transfuge.)

Comment est née votre passion pour la littérature et surtout pour l’écriture ?

J’ai toujours aimé la littérature, mais ma passion pour l’écriture est venue sur le tard, alors que je pensais consacrer ma vie à l’image et la scène (je voulais être cinéaste et metteur en scène d’opéra). Arrivé un peu par hasard au Figaro Littéraire, je me suis « frotté » à l’écriture sans objectif particulier, et me suis rendu compte que j’aimais ça et que je le faisais plutôt bien. A force d’écrire des articles, je me suis amusé à écrire quelques nouvelles, lesquelles ont été publiées, en 2001, aux Belles Lettres. Cela s’appelait Le Sourire des enfants morts.  C’était mon premier livre. Trente-et-un autres ont suivi depuis ; et ce n’est pas terminé, j’espère !

Quel est l’auteur/le livre qui vous ont marqué le plus dans la vie ?

Je n’ai pas vraiment de livre de chevet, mais surtout des auteurs cultes, auxquels je reviens sans qu’ils soient pour moi des modèles : Aymé, Simenon, Barjavel, Ray, Borges, Hardellet, Nabokov, Larbaud, les grands russes, Pierre Benoît, le Dumas de Monte-Cristo, les folies romanesques de Serge Brussolo, ou le style princier de Paul Morand ; ça part tous azimuts. Mais un livre a marqué une sorte de bascule : c’était, à l’été 1986 (j’avais 11 ans), la lecture du Talisman des Territoires de Stephen King et Peter Straub, qui fut ma première immersion absolue, addictive, dans un univers romanesque.

Quel genre littéraire pratiquez-vous (roman, poésie, essai) ? Passez-vous facilement d’un genre littéraire à un autre ?

N’était la poésie (à laquelle jamais je ne m’essaierai) j’ai abordé à peu près tous les genres (romans, nouvelles, bios, essais, récits, dictionnaires, guide, éloge, beaux livres, lettre ouverte…) avec des bonheurs divers mais une faim d’écriture jamais rassasiée.

Comment écrivez-vous – d’un trait, avec des reprises, à la première personne, à la troisième ?

Après avoir préparé mon terrain (recherche, docs, plan détaillé, bible de mes personnages etc.) je rédige généralement d’un premier jet, sans relire ; puis commence le long (et passionnant) chemin de croix de la récriture, du peaufinage, du lustrage, du doute, du découragement, de la libération. Quant aux narrateurs, cela dépend du texte. Il n’y a aucune règle à cela.  

D’où puisez-vous les sujets de vos livres, et combien de temps est nécessaire pour qu’il prenne vie comme œuvre de fiction ?

Je suis inspiré par l’Histoire et les lieux. Les grandes tragédies du XXe siècle européen (surtout l’occupation allemande) m’ont inspiré plusieurs ouvrages. Quant à la ville de Paris, elle est le personnage principal de toutes mes œuvres de fiction, comme une manière de fil rouge. Un gros roman comme je les façonne demande entre deux ans et demi et trois ans de travail (idée, documentation, rédaction, corrections, publication). C’est dévorant et passionnant !

Choisissez-vous d’abord le titre de l’ouvrage avant le développement narratif ? Quel rôle joue pour vous le titre de votre œuvre ?

Il n’y a pas de règle. Certains titres sont venus au tout début, d’autres quelques semaines avant le « bon à tirer » du roman. Le titre n’est pas un mantra, juste une béquille. Mais leur rôle est essentiel, car il est l’appât qui va séduire le lecteur, l’intriguer. C’est pourquoi ils ne doivent jamais obéir à une vue de l’esprit de l’auteur, qui le trouverait « joli » (comme la couverture) mais doivent parler d’emblée, même s’ils semblent étranges, mystérieux.

Quel rapport entretenez-vous avec vos personnages et comment les inventez-vous ?

Je les invente avec une application et une passion d’artisan, de marionnettiste. Mais il arrive parfois qu’une fois lancé dans l’écriture, je sois hanté par mes personnages au point qu’ils pilotent un roman dont je ne suis plus que le véhicule, pas le chauffeur. Sentiment passionnant, troublant, dont parlent souvent les écrivains et que j’ai parfois expérimenté ; comme une sorte de possession sans démon.

Parlez-nous de votre dernier ouvrage et de vos projets.

Ce que l’on sait de Max Toppard est sorti chez Albin Michel en mars 2022. C’est la biographie en creux d’un des génies méconnus de l’histoire du cinéma, qui a traversé le premier demi-siècle du septième art, connu les plus grands, soufflé à leur oreille, mais dont on a détruit tout souvenir.

Je publierai ensuite une biographie d’Arletty, chez Calmann-Lévy. Puis un Dictionnaire amoureux du mauvais goût, chez Plon. Les deux sont déjà finis (le covid m’a donné beaucoup de temps d’écrire). Et je travaille présentement sur un prochain roman…

(Photo de Nicolas d’Estienne d’Orves : ©Marlene Delcambre)

Print Friendly, PDF & Email
Partagez cet article