Portrait en Lettres Capitales : Jessica Nelson

 

 

Qui êtes-vous, où êtes-vous né, où habitez-vous ?

Je suis née dans une petite ville de la Drôme, Romans – prédestination ? – et je vis aujourd’hui à Paris.

Vivez-vous du métier d’écrivaine ou, sinon, quel métier exercez-vous ?

J’ai toujours travaillé dans le monde des livres. J’ai cofondé il y a quelques années une maison d’édition indépendante, spécialisée dans la reproduction de manuscrits de grandes œuvres, qui me procure beaucoup de joies et de découvertes, et qui me permet d’être toujours connectée à l’acte de création littéraire…

Comment est née votre passion pour la littérature et surtout pour l’écriture ?

J’ai toujours aimé lire ; petite je me plongeais dans les romans qui passaient à ma portée, quel que soit le genre. Les livres sont mes amis depuis l’enfance, aussi n’était-il pas étonnant que je continue à les fréquenter avec assiduité à l’âge adulte !

Quel est l’auteur/le livre qui vous ont marqué le plus dans la vie ?

Jean Cocteau, sans hésitation. Même si beaucoup d’autres écrivains m’ont accompagnée, évidemment, comme Boris Vian et sa musique ou encore René Barjavel et son onirisme palpitant. Mais Jean Cocteau a été comme un magicien pour moi, il m’a donné des clés pour ouvrir certaines portes, en moi, ou pour déchiffrer le monde ; à travers des textes aussi différents que La Difficulté d’être ou Le Mystère de Jean l’oiseleur… J’ai le sentiment très étrange de connaître Cocteau, de le connaître d’ailleurs.

Quel genre littéraire pratiquez-vous (roman, poésie, essai) ? Passez-vous facilement d’un genre littéraire à un autre ?

Plutôt le roman, ces dernières années. Mais j’aime aussi beaucoup écrire des nouvelles, qui est pour moi un art à part, celui de la concision et de la puissance dans la brièveté. J’ai aussi beaucoup aimé écrire, jadis, un essai sur l’anorexie, afin de changer la perspective que l’on avait sur la maladie ; ou encore des romans mythologiques pour les pré-ados.

Comment écrivez-vous – d’un trait, avec des reprises, à la première personne, à la troisième ?

En général, le roman mûrit en moi longuement. Il infuse, sans que je prenne la plume. Il prend sa place petit à petit, jusqu’à ce que le traduire sur papier devienne indispensable – sinon, j’étouffe – et ensuite le temps de l’écriture peut durer quelques mois. Spontanément, je dirais que j’écris plutôt à la première personne et au présent ; mais selon les besoins du texte, il m’arrive de tout passer à la 3e et au passé simple… J’écris sans me relire, pour le premier jet. Puis commence une phase assez longue où je corrige et réécris sur papier. Avant de repasser à l’ordinateur.

D’où puisez-vous les sujets de vos livres, et combien de temps est nécessaire pour qu’il prenne vie comme œuvre de fiction ?

J’écris sur des sujets ou des personnages qui m’obsèdent, et qui ne me laissent pas le choix de les laisser tranquilles ! Un projet peut mettre plusieurs années à germer, même si le temps d’écriture est plus ramassé ensuite.

Choisissez-vous d’abord le titre de l’ouvrage avant le développement narratif ? Quel rôle joue pour vous le titre de votre œuvre ?

Je ne veux pas en faire une généralité, mais là aussi, jusqu’à présent, il s’est imposé à moi tout seul, presque sans que j’y pense. Il s’agit souvent d’un titre lié à une citation, à un aphorisme, une phrase que j’ai entendue, en rapport avec le roman en question.

Quel rapport entretenez-vous avec vos personnages et comment les inventez-vous ?

Je les aime évidemment, je les déteste un peu à certains moments, quand ils se dérobent à moi par exemple – Raymond Radiguet a été long à apprivoiser, et ensuite il n’a plus voulu me quitter ! – ou qu’ils sont un peu trop présents…

Parlez-nous de votre dernier ouvrage et de vos projets.

Mon ouvrage publié le plus récemment est Brillant comme une larme, sur la vie de météore de Raymond Radiguet. Le roman sur lequel je travaille actuellement – il ne paraîtra pas tout de suite – s’articule aussi autour d’une trajectoire hors du commun, une femme cette fois, dans un siècle où les créatrices disposaient de peu de liberté pour s’exprimer. Et puis il y a les manuscrits que j’étudie pour les éditions des Saints Pères. En ce moment, je suis plongée dans les archives colossales d’un géant des lettres américaines. Une expérience vertigineuse, qui ne me repose pas franchement des frasques de l’héroïne que je tâche de mettre en scène dans mon roman. Mais la littérature est tout sauf du repos…

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